25/03/2012

En France, un climat...

 «Mettre en cause la société, montrer du doigt la France, la politique, les institutions, ce n’est pas digne», attaque-t-il. «Ce n’est pas faire preuve d’un esprit de responsabilité dans un moment où la nation a d’abord besoin d’unité. (…) Non, il n’y a pas en France un climat qui puisse expliquer ces crimes. (…) Chercher une explication au geste de ce fanatique, (...), lui chercher la plus petite excuse serait une faute morale impardonnable.»

 Sarkozy à Strasbourg, le 21 mars 2012

Oui, mais expliquer n'est pas un  synonyme d'excuser. Ce qui serait une faute surtout, c'est de ne pas savoir expliquer la construction de cette tragédie qui oscille entre fait divers imprévisible et acte de terrorisme inévitable. Et ce sermon moralisateur, non dénué d'intimidation même, est un peu court pour balayer la responsabilité de celui qui est de près ou de loin en charge de la sécurité des français depuis 10 ans désormais.

Ok, soit, ce n'est sans doute pas le discours de Grenoble, le débat sur l'identité nationale, la burka ou le hallal qui a fabriqué le monstre de Toulouse. Celui ci était déjà trop absorbé par le visionnage de vidéos de décapitation ou autres jeux vidéo violents pour être sensible aux sujets de société qui démangeaient l'hexagone, et l'islamisme furieux a fait le reste.
Ok pour dire que ce n'est pas forcément le climat en France qui a engendré ces crimes.
Mais reconnaissons que le climat en France n'a pas permis de les éviter.

Je ne jetterai pas la pierre aux diverses instances étatiques impliquées dans le drame de Toulouse en les accusant de manquements ou de failles. Justice, Police, DCRI... Depuis 10 ans ces organisations doivent mener de front des opérations aussi vastes et variées que la surveillance d'activistes islamistes radicaux et celles de fadettes de journalistes, assurer le suivi judiciaire de délinquants déséquilibrés tout en assurant des procès fleuves tels que Clearstream, traiter avec le Pakistan de sujets aussi divers que le commerce de sous marins nucléaires et les allers-retours de djihadistes. Il serait injuste de leur chercher des poux.

Non je crois qu'il est simplement temps de se reposer la question de la stratégie en place pour assurer le maintien de l'ordre depuis 10 ans.
Car finalement, avec le recul, un match de rugby contre le commissariat de proximité n'était-il pas plus subtil qu'une tragique partie de paintball contre une unité d'élite?



Police : Havrin - Sarkozy zéro par bakchichinfo

23/03/2012

Gravité

C'était pile ou face. Anders Behring Breivik ou Khaled Kelkal. 

Ce fut Khaled Kelkal. Plus exactement Mohamed Merah.

Bayrou a perdu, Guéant a gagné.

Nouveau coup de pouce d'Al Quaeda

Qui a réélu George W. Bush. Coulé Aznar.

Et Sarkozy? Ce qui est sûr, c'est que cela ne peut pas lui nuire (1).

Tout dépendra de savoir quand le soufflet va retomber. Quelle est la durée de vie d'un tel débordement émotionnel médiatique? Cette "séquence" taillée sur mesure lui suffira-t-il pour faire oublier tout le reste?

Peu importe. Au delà du drame, ce qui est à pleurer, toutes proportions gardées, c'est que le bilan humain ne se limitera pas à ces 7 pauvres victimes. Parce que ces évènements vont être récupérés par les cultivateurs de haine et d'amalgame pour alimenter les discours et les politiques les plus nauséabondes les prochaines années, et prédire, non sans une certaine indécente excitation auto-réalisatrice, les tragédies de demain... Les extrêmistes enragés ne sont pas prêts d'arrêter de nous pourrir la vie.

Le mal est fait. Le péril extérieur dort à l'intérieur. Le ver est dans le fruit. Le loup est dans la bergerie. Il est probable que le troupeau tétanisé se remette à suivre le berger peu prévenant dont il s'était progressivement détourné. Le suffrage universel pour choisir un personnage, c'est un concours de beauté pour moutons de Panurge. Il y a donc de fortes chance pour que l'on reconduise celui qui nous conduit ici (jusqu'ici), et celui ci a de fortes chances pour continuer à organiser le monde autour de ce qui renforce son statut de berger.

Je m'étais fait la même réflexion le 11 septembre 2001. Tout se vérifie. 

Conflit Israelo-palestinien. Irak. Radicalisation, extrêmisme, Afghanistan, guerre. Islamophobie, antisémitisme. Choc des civilisations minutieusment entretenu. Antiterrorisme. Répression. Le coupable enrôlé en prison. Comme prévu.

Pendant ces dix dernières années, si Mohamed Merah n'était pas passé par la case prison, il ne serait sans doute pas allé en Afghanistan. Commes d'autres.

Mais ici on préfère continuer à construire des prisons. C'est un choix.

L'humain se laisse plus facilement tirer vers le bas que vers le haut.

C'est surtout ça, la gravité.

J'en suis conscient, mais j'ai toujours du mal à l'accepter.

Et hop, 10 années de perdues, aucune de retrouvée.

 

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(1) Lire ici . A l’étranger, des crises de ce type ont pu avoir un impact très fort sur les élections : la popularité de Georges W. Bush a été dopée (+30 points) après attentats du 11-Septembre, l’élection et la réelection d’Ariel Sharon en Israël sont dues en grande partie à la psychose sécuritaire israëlienne causée par les attentats quotidiens, Vladimir Poutine était pratiquement inconnu des Russes avant son élection, il s’est fait connaître quelques semaines avant le vote en expliquant qu’il irait “buter les terroristes tchétchènes jusque dans les chiottes”. A chaque fois, cela a profité à celui qui incarnait l’autorité, aujourd’hui ce serait Nicolas Sarkozy.

 

16/03/2012

Candidat sans convictions

Qu'on me donne l'envie, l'envie d'avoir envie
Hier soir, après avoir passé 3 heures à botter en touche pour ne pas se mouiller,  François nous a exhortés à lui donner la force. J'ai toussé.
Ce n'est ne pas de la force qu'on a envie de donner aux dirigeants. Ils en font trop souvent mauvais usage. C'est plutôt des bonnes idées, de l'imagination, de l'envie, bref des convictions qui pourraient changer les choses. Et là, le François, il en a bien besoin.
Car non seulement il manque désespérément d'imagination, mais en plus quand il prône des mesures intéressantes, il ne sait pas les défendre.
Politique à papi
Un exemple. La taxation des hauts revenus à 75%. Une mesure "morale" selon lui.
Mais ça veut dire quoi? Cela veut dire qu'on interdit les hauts salaires parce que c'est indécent, au nom de la bienséance, comme on interdit de se balader seins nus ou en niqab dans la rue? Parce que ça choque les braves gens?
Si ça ne tenait qu'à ça, je serais contre cette mesure, digne des trente glorieuses. Un Etat qui fait usage d'autorité pour ne pas froisser le regard oblique des passants honnêtes ne m'intéresse pas.
En revanche, d'un point de vue de l'intérêt général je suis favorable à cette mesure. Pour quelle raison? Parce que je considère que le rôle d'un Etat est de mettre en place des règles de fonctionnement qui favorisent l'intérêt général. Parce que s'il n'y a pas de règle, l'individu ne va pas spontanément choisir le comportement vertueux. Le patron va donc se payer de façon abusive, parce que son voisin patron le fait aussi. Et ça, c'est mal.
Aidons François à s'attaquer "idéologiquement" aux inégalités
Pourquoi c'est "mal" de se payer abusivement?
Parce que, même si les économistes avaient raison en disant que le fait que les uns s'enrichissent n'appauvrit pas les autres, cela accroît les inégalités.
Est-ce que François considère-t-il que les inégalités sont bonnes pour l'intérêt général, comme le font sans complexe Sarkozy, Copé et cie qui nous expliquent à longueur de temps que la seule chose qui motive les gens c'est de devenir très riche et que s'il n'avait pas eu la perspective de devenir milliardaire Steve Jobbs n'aurait pas exprimé son génie? Et que donc il ne faut pas empêcher les gens de devenir très riches sinon ils vont tous se mettre à fumer des joints à longueur de journée en fraudant les assedics?
Ou bien est-ce que François pense que l'humain vaut quand même mieux que cela, qu'il a juste besoin de respect, et qu'il sera d'autant plus motivé pour bosser et faire preuve de conscience professionnelle qu'il n'aura pas l'impression de se faire exploiter par un dirigeant qui lui demande de se serrer la ceinture pour mieux se gaver?
Qu'attend-t-on pour oser affirmer que l'inégalité n'est pas facteur de richesse, mais de pauvreté? Qu'attend-on pour empêcher la droite pour continuer à faire des roues arrières sur leurs boulevards idéologiques ?
Je n'ai pas entendu François s'exprimer sur le sujet. A t-il seulement un avis sur la question? Si François refuse le bras de fer idéologique avec la droite, la fin de partie va décidément être douloureuse...

06/03/2012

Jamais responsable, encore moins coupable, et bien sûr toujours victime.... jusqu'au bout...

 

Des nouvelles de notre plus haut (ir)responsable 


Sarkozy est à terre. Mais il vit encore.

On n'est plus à une indécence près. Le voilà qui se bat pour substituer la préservation de son propre destin au destin du pays dans les préoccupations mentales de nos concitoyens, par une énième manipulation émotionnelle, cocktails d'identification-projection-introjection-chantage dont il a le secret.  C'est ce que met en évidence Philippe Sage, avec un résultat plus qu'éloquent.

On ne voit pas comment ça pourait fonctionner, mais qui sait, les français ont souvent montré qu'ils aimaient les grosses ficelles. Et pourquoi pas, faire mentir l'adage voulant que les histoires d'amour finissent mal.

Peu importe les pronostics, je veux juste ici approfondir ce que tout cela révèle du personnage de Sarkozy, qui pourtant était déjà perceptible depuis toujours.

En effet cette posture victimaire, cette incapacité à assumer n'est pas nouvelle. Contrairement à Philippe Sage qui évoque le rejet "viscéral" de Sarkozy pour la repentance pour expliquer cette attitude, j'y vois surtout la relation hystérique qu'il entretient avec le "pouvoir". Et sa plus totale incompréhension de ce qui lie le pouvoir et les responsabilités.

Détrompez-moi, mais je n'ai pas souvenir d'avoir vu un jour Sarkozy assumer correctement ses responsabilités. Ce qui est ennuyeux quand on a prétendu aux plus hautes.

Petit rappel de psychologie humaine

Victimisation et culpabilisation sont des syndromes symétriques de déni autour de la question de la responsabilité.

L'auto-victimisation, c'est quand on n'assume pas son pouvoir réel et les responsabilités qui en découlent. C'est quand on nie notre impact sur le cours des choses, qu'on attribue la cause de tout ce qui nous arrive à l'action des autres ou à l'environnement. Plus ou moins consciemment, on préfère invoquer la fatalité que les conséquences de nos propres actes, on minimise la portée de ses responsabilités réelles.9711-franck-ribery-au-bord-des-larmes-telefoot-video.gif

L'auto-culpabilisation au contraire, c'est quand on n'assume pas notre impuissance réelle. Plus ou moins consciemment, on exagère la portée de nos responsabilités. Plutôt qu'assumer son impuissance, on assume une faute imaginaire dont on veut croire qu'on n'aurait pu l'éviter, et qu'à l'avenir on ne la reproduira plus, pour maintenir l'illusion qu'on a ce pouvoir. Préférant la sanction à la fatalité, on s'attribue des responsabilités imaginaires.

Celui qui se victimise culpabilise forcément les autres, et réciproquement.

On a tous en tête l'image du petit caïd de notre collège ou de la caillera de notre quartier qui va crier à l'injustice et chercher à émouvoir les autorités avec moultes circonstances dédouanantes lorsqu'il est pris la main dans le sac. Ou du footballeur controversé qui vient jurer la main sur le coeur qu'il est victime de calomnie. Ce genre de victimes autoproclamées existent aussi dans les sphères bien plus respectables, et peut être cela nous choque moins.

Dans une démocratie représentative, je laisse à chacun d'apprécier le partage du pouvoir, des responsabilités, de la culpabilisation et de la victimisation, entre les citoyens représentés et leurs représentants. Ces dernières années, il me semble que le curseur a bien bougé...

S'attribuer les succès des uns, attribuer ses échecs aux autres 

Qui a en effet passé 5 ans à dénoncer des coupables individuels ou des causalités extérieures pour se défendre des carences du fonctionnement dont il avait la charge?

Les traders qui abusent, les profs qui savent pas instruire nos enfants, les assistés sociaux qui parasitent la société, les juges laxistes qui prennent les mauvaises décisions,  les délinquants multirécidivistes "génétiques" qui ne devraient pas naitre...

Pour celui qui a passé des années à théoriser sur la sincérité, l'irréprochabilité, la transparence (alors que Mediapart nous a révélé par exemple qu'en tant que ministre de l'intérieur il se rendait en Arabie Saoudite pour parler officiellement de laïcité le jour et d'armement la nuit), il n'y a rien d'étonnant à voir qu'il n'applique pas à lui même les principes imposés aux autres. La culture du résultat, les limogeages ou les mutations imposées de façon impitoyables et arbitraires voudrait qu'il ait la décence de ne pas se représenter, à défaut de démissionner. Mais non.

Le voilà toujours aussi pathétiquement droit dans ses bottes, à attendre qu'on s'apitoie sur son sort.

Icône du monde ancien.

Ce personnage restera dans l'histoire comme l'icône la plus aboutie de ce que la France néolibérale aura engendré : un combattant forcené, inflexible, sans limite, sans pitié, sans éthique. Un manipulateur habile, stratège des émotions, joueur virtuose du "pas vu pas pris" et du "je te tiens, tu me tiens, par la barbichette", à l'energie rare et au talent exceptionnel, en compétition contre tous. Le paroxysme de l'individualisme irresponsable et cynique, qui n'a pas à se préoccuper des conséquences de ses actes, puisque la doctrine dit qu'il suffit de donner le meilleur de soi même pour jouir par l'argent dans un monde toujours plus riche.

Un monde simple où les gagnants ont raison et les perdants ont tort. Un monde simple du "chacun pour soi et dieu pour tous" qui aurait pu être le meilleur des mondes, si seulement le bon dieu (ou la main invisible, selon qui nous le promettaient) avaient mieux fait leur boulot. Bref, c'est pas de sa faute... 

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