20/12/2012

L'Etat chahuté par ses actionnaires..

En me promenant sur un blog, j'ai lu de la part de commentateurs cette phrase : "L'Etat-Providence que l'on veut à tout prix développer en France".
J'ai toussé. Y en a t-il qui croient encore à ça?

L'Etat Providence c'est un truc d'il y a 30 ans, ça. Depuis l'eau a coulé sous les ponts. On nous a démontré depuis que la solidarité c'était de l'assistanat, une subvention pour promouvoir l'oisiveté, que c'était une prime à la paresse et qu'à cause de ça on mourrait tous de ce fait alcooliques et drogués sur notre canapé. Du coup, on est tous convaincu que la solidarité, c'est mal.
Non l'époque n'est plus à la bienveillance collective. Désormais on se stimule à la providence version loterie et à l'autoflagellation. Ben oui, on a compris, ça fait 20 ans qu'on culpabilise de "coûter trop cher". Faut rembourser.
On coûte trop cher à nos propres entreprises qui ne peuvent pas faire autant de profits qu'elles le voudraient, à nos talents contraints à l'exil tellement ils sont persécutés par la puissance publique, et désormais à nos enfants puisqu'on nous dit que quand on achète une boite de médicament, la moitié sera payée par nos enfants. Il n'est pas un jour où on entende une information, un propos, un détail qui nous rappelle que l'on coûte trop cher. Alors pensez-vous, développer l'Etat Providence pour coûter encore plus cher, nul n'y songe.

Non en réalité, l'Etat Providence fond comme nos glaciers dans les Alpes tout simplement car depuis que les Etats sont obligés de se financer sur les marchés privés, ils ont été petit à petit considérés comme des énormes entreprises lucratives pour les investisseurs. Surtout quand la crise rend les entreprises privées moins lucratives. Et les investisseurs, sous ce titre pompeux, ça reste des capitalistes basiques. Ils ne supportent pas de voir leur part de gateaux s'effriter pour que  les nécessiteux récupèrent des miettes. Ils ont décider de remettre de l'ordre dans tout ça. Et ont décidé de montrer au reste du monde qui c'est qui décide, bon sang.
Les Etats sont pieds et poings liés à leur créanciers, comme le raconte naïvement François Baroin dans son bouquin, quand il relate la scène où il n'en menait pas large face à un patron d'un grand fonds de pension américain pour négocier un taux raisonnable sur les obligations lors de la crise de l'Euro. Mais officiellement notre souveraineté est intacte.
C'est un fait, le Ministre des Finances de la 5ème puissance mondiale, obligé d'embellir la mariée pour ne pas contrarier les investisseurs privés, comme un chef d'entreprise qui doit rassurer ses actionnaires. Une grosse entreprise, remarquez. La France verse 50 milliards d'euros chaque année d'intérêts sur sa dette à ses créanciers. Soit plus que les dividendes annuels distribués par l'ensemble du Cac 40 lors des dernières années. Notre prestige est sauf.
Bref. Peu importe. Nos créanciers, à travers les préconisations des banques de notation, dictent la bonne conduite à tenir pour les gouvernements pour garantir la performance de leurs placements. Qui, dans ces conditions, aurait la naïveté de vouloir sauvegarder l'Etat Providence, je vous le demande?

En attendant dans le petit écran on peut parler des impôts. De l'horrible pression fiscale qui fait fuir nos riches. Souvenons-nous que chaque année la part de la recette de l'impôt sur le revenu est entièrement engloutie par la charge de la dette. Autrement dit, dans les prélèvements obligatoires dont on est champion du monde, une part sert à financer les retraites d'américains qui sont gérées par le fonds de pension dont parlait Baroin.


Dans le petit écran on peut parler aussi de la dette envers nos enfants. C'est vrai, c'est triste de se dire qu'on leur fera payer une partie de la boite de médoc qu'on s'offre aujourd'hui pour guérir le cancer que nos parents à nous nous ont légué en décrétant qu'il fallait adapter la ville à l'automobile. C'est aussi ça la solidarité intergénérationnelle.
Mais qu'ils se rassurent, ce n'est pas la pire dette qu'on leur lègue. C'est marrant d'ailleurs comme on parle moins de nos enfants en revanche quand on évoque les gaz de schiste, le nucléaire, l'exploitation sans vergogne des ressources naturelles et toutes nos autres initiatives compulsionnelles pour maintenir la croissance... De bons rendements financiers pour les investisseurs, certes, mais dont nos enfants auront à payer la facture cachée, demain, lors des futures pénuries, pollution, saturation des déchets et autres dérèglements climatiques aux conséquences géopolitiques inquiétantes...
L'Etat Providence, on a bien compris que c'était un luxe désormais inaccessible. Mais un Etat indépendant, garant de l'intérêt général, sous l'autorité d'un système si possible démocratique, c'est encore trop demander?

On n'en parle pas beaucoup de tout ça. On sait juste qu'on coûte trop cher...

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